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EDUCATION ET AIDE HUMANITAIRE
13 novembre 2008

Y A-T-IL TROP DE PSYS AUTOUR DES ENFANTS?

Une interview réalisée par Anne Claire THERIZOLS

Edwige Antier : “C’est extraordinaire une société où l’on réfléchit sur son rapport avec son enfant” 

Pédiatre et psychothérapeute de renom, Edwige Antier, qui vient de publier “Dolto en héritage” chez Robert Laffont, voue sa vie à l’épanouissement des enfants… et de leurs parents. Elle nous livre ses réflexions quant à la bonne utilisation des psys !

Les consultations psy dédiées aux enfants ont doublé en quelques années. Est-ce un phénomène de mode ou les enfants vont-ils plus mal qu’avant ? 

Ce n’est pas tant que les enfants aillent plus mal qu’avant, c’est que depuis la parole de Dolto qui a dit : “le bébé est une personne”, et qui l’a fait comprendre aux parents, on ne peut plus considérer le nouveau né seulement comme un tube digestif, un corps et des comportements à dresser, mais comme un être à comprendre. A partir de là, le psychisme de l’enfant est devenu à la fois passionnant à découvrir pour les parents – et tout le monde est même revenu aussi vers sa propre enfance – et en même temps c’est pour eux une responsabilité assez vertigineuse puisqu’ils se sont rendu compte que le développement de l’enfant était très dépendant de leurs propres attitudes. On ne peut donc pas parler de mode. Ca a vraiment été le début d’une nouvelle ère, une révolution qui a donné sa reconnaissance à la vie psychique de l’enfant. Autrefois, on était entouré de “sorciers” de village, de prêtres, de tas de personnes qui s’occupaient de la vie psychique. Aujourd’hui, on les appelle psychologues, pédopsychiatres ou psychothérapeutes. Ils ont la même fonction, à cela près qu’ils se basent sur de véritables études et connaissances.

Les parents viennent-ils toujours de façon justifiée ? 

Je pense qu’il est toujours justifié de vouloir mieux comprendre son enfant. On ne consulte pas toujours parce qu’il y a une véritable problématique qui risque d’évoluer de façon néfaste. Ca peut venir simplement de la volonté d’avoir une attitude plus positive avec son enfant. Mais c’est toujours justifié. C’est extraordinaire une société où l’on réfléchit sur son rapport avec son enfant.

A quoi, en revanche, reconnaît-on qu’une consultation s’impose ? 

Vous savez, Freud avait donné une très bonne définition de qui doit recourir au psychanalyste. Aux adultes, il disait : “consultez lorsque vous n’êtes pas capables d’aimer quelqu’un et lorsque vous n’avez pas de goût à travailler”. Pour l’enfant, c’est pareil. Si l’enfant est en échec scolaire complet, en refus d’apprendre ou si l’enfant n’a pas de copains et passe son temps triste, enfermé, voilà les motifs essentiels de consultation. Chez les tout petits (les 6 premiers mois), ce serait plutôt lié à la maman. Si elle n’a pas envie de travailler, si elle n’a pas envie de s’occuper de sa maison, de son bébé, si elle pleure le matin, si elle est trop triste pour pouvoir jouer avec son bébé, lui sourire, faire les marionnettes, si ça va mal avec son compagnon ou son époux, le bébé le ressent. Dans l’unité mère-enfant de ce début de vie, si le bébé est triste, s’il ne mange pas, s’il dort mal, là, ce sont souvent les deux qui doivent consulter.

On a parfois l’impression que les parents sont dépassés, perdus, qu’ils culpabilisent ou ont peur de mal faire. Ont-ils perdu confiance en eux ? 

A comprendre leur enfance, ils y retombent eux-mêmes. Par exemple, Dolto a dit “il faut parler à votre enfant, c’est un être de parole”. Alors beaucoup ont cru qu’il fallait tout lui dire. Mais elle ne disait pas vraiment ça, elle disait “il faut lui dire les vérités qui le concernent”. Il n’est pas bon en revanche de le tournebouler avec des tas de discours et des justifications incessantes dont l’enfant, doté dès la naissance d’une intelligence sensorielle extraordinaire, ne retiendra que le ton angoissant. Et je trouve que Dolto nous a livré un véritable alphabet du psychisme enfantin que je remets à la portée des parents pour qu’ils s’y retrouvent, qu’ils discernent ce sur quoi ce n’est pas la peine de dériver. Voilà 20 ans que les mamans imprégnées de psychologie ont cru que tout comprendre signifiait tout permettre. Ce n’est pas du tout ce que disait Françoise Dolto. Son discours a été brouillé par le discours post soixante-huitard. “Il est interdit d’interdire”, ça, ce n’est pas Françoise Dolto. Elle disait bien “vous ne devez pas devenir des toupies complètement trimballées par votre enfant”. Tout comprendre, ça ne veut pas dire tout permettre. Les pères et les mères d’aujourd’hui sont souvent à 180°, c’est-à-dire : « je comprends tout et tout d’un coup je lève la main ». Comme me disait un enfant récemment, “les parents, ils sont bizarres, ils nous laissent faire des tas de choses que l’on ne devrait pas faire et tout d’un coup ils se fâchent, on ne comprend même pas pourquoi”. Du coup, les enfants perdent le respect des parents parce que quand vous êtes illogique, le message ne passe pas.

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